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3 – Grossesse et rejet du handicap, trois femmes témoignent

Aurélie et Théodore
© DR.

[Aurélie Vallon, 27 ans, Nancy] Alors que le droit à l’avortement vient d’être gravé dans la Constitution, trois femmes ont accepté de témoigner sur les pressions exercées et les peurs ressenties au cours de leur grossesse, pour ne pas garder leur enfant porteur de handicap ou de malformation. Alors que l’accueil d’une trisomie 18, d’un polyhandicap ou d’un syndrome rare les fait passer pour « inconscientes », ces mères éveillent les consciences à la différence.

« Sa vie donne du sens à qui je suis »

Aurélie Vallon, 27 ans, Nancy

Au cinquième mois de grossesse, on a su que notre petit garçon aujourd’hui âgé de 3 ans était porteur d’une maladie génétique, appelée le syndrome de Cornelia de Lange.

La façon dont l’échographe posait les questions sous-entendait que je devais répondre « non » pour aller jusqu’au terme. Il me décrivait mon enfant comme une chose non viable plutôt qu’un enfant, un petit être humain classique.

Après la première annonce du handicap, qui a été un moment très délicat, j’ai réfléchi à toutes les potentialités et ne me suis fermée aucune porte. Ce qui a été libérateur, c’est de réfléchir à l’accompagnement après : si mon bébé était en souffrance à la naissance, comment serait-il accompagné ? D’où l’importance des soins palliatifs qui donnent une réponse de confort. Grâce au pédiatre du service anténatal, j’ai trouvé un sens chrétien à l’accompagnement que je voulais donner à mon enfant, et à la vie qui se pointait.

Avec le papa de Théodore – dont je suis séparée aujourd’hui, nous étions prêts à ce qu’il puisse vivre et mourir peut-être au bout de 2 heures. Lui m’a beaucoup respectée durant tout ce temps, en m’accompagnant coûte que coûte.

Pour mes parents, l’annonce pendant la grossesse a été un grand choc. C’était pour eux inconcevable de mener à la vie un enfant comme ça, comme si c’était moi qui lui donnais la souffrance. Alors qu’on ne choisit pas que notre enfant soit différent. Je n’ai pas choisi la différence, mais j’ai choisi de l’accompagner de tout mon cœur. Pendant ma période de discernement, mes parents espéraient que je n’aille pas vers ce qu’ils considéraient comme une erreur, même s’ils savaient la valeur que j’accordais à cette vie.

Théodore, qui était déjà très faible in utero, avait perdu beaucoup de poids à la naissance. On nous disait qu’il allait mourir. Finalement il s’est battu, il est toujours là, et on ne compte plus en termes de jours, de semaines ou d’années. Les médecins restent très évasifs sur la suite.

Ce petit garçon apporte une joie immense dans la vie de ceux qu’il rencontre : il est souriant, d’une grande simplicité. Aujourd’hui, je suis sûre que pour mes parents qui avaient si peur, la vision du handicap a changé. Ils ont de très beaux liens avec Théodore. Et le regard de mes proches a évolué.

Dans certains cas, les mamans peuvent se sentir très isolées par le handicap, mais mon fils, lui, fédère autour de lui. C’est sûr que c’est une implication importante dans ma vie de tous les jours, et que ce don peut me dépasser. En même temps, je suis heureuse d’être à ses côtés et de sentir à quel point j’ai ma place. Sa vie donne du sens à qui je suis.

Témoignage recueilli par Marilyne Chaumont ombresetlumiere.fr – 15 mars 2024

Retrouvez le premier témoignage :  « Vous allez gâcher l’existence de vos deux autres filles »

Retrouvez le deuxième témoignage : « Je me sens jugée, manipulée, sans cesse obligée de me justifier »

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