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Au lendemain de la conférence du handicap, le flou l’emporte

Prise de parole de la ministre Geneviève Geneviève Darieussecq lors de la conférence nationale du handicap.
©capture d’écran

La conférence nationale du handicap s’est tenue hier, le 26 avril, à l’Élysée. Organisée pour fixer les grandes orientations des politiques publiques en faveur des personnes handicapées, ce rendez-vous laisse certaines associations et personnes concernées sceptiques.

Tous les trois ans, depuis la loi de 2005, une conférence pour donner un cap sur les politiques publiques sur le handicap est organisée. Cette année, c’est dans un climat tendu, marqué par le boycott de plusieurs associations que la sixième CNH s’est ouverte. Au total, 70 mesures ont été annoncées dans les domaines de l’accessibilité, l’éducation, l’emploi et la formation, la vie affective et le secteur médicosocial.

En matière d’accessibilité, l’annonce du remboursement intégral de fauteuils roulants manuels et électriques a fait couler de l’encre. Charlotte de Vilmorin, cofondatrice et ancienne présidente de Wheeliz, entreprise de location de véhicules adaptés entre particuliers, fait part de son scepticisme : « Dans l’idée, c’est une mesure louable mais cela me paraît complètement idéaliste. » La jeune trentenaire, atteinte d’une amyotrophie spinale, qui se déplace en fauteuil roulant électrique en sait quelque chose. Le fauteuil qu’elle possède actuellement lui a coûté 40 000€. La sécurité sociale lui a remboursé 8 000€. « Le reste, je dois monter des dossiers à n’en plus finir auprès de plusieurs mutuelles. Les délais de traitements sont extrêmement longs. Alors comment croire que, d’un coup, l’on pourrait être remboursé à 100% ? Pour tous les fauteuils ? En combien de temps ? C’est flou… Je crains que cette annonce ne soit cet arbre qui cache la forêt des véritables problèmes. »

Un manque de chiffrage

Et pour celle qui a suivi en direct la conférence, par vidéo, les vrais sujets de fond sont nombreux. « Ma seule attente, c’est que l’on applique la loi ! En France, le handicap est encore le premier motif de discrimination et il y a encore trop d’obstacles dans l’éducation, l’accessibilité, l’emploi au quotidien. Les droits fondamentaux des personnes handicapées ne sont pas respectés. J’avais l’espoir que les Jeux olympiques de Paris accélèrent le processus mais on en est encore loin… », regrette Charlotte de Vilmorin qui se réjouit en revanche des 1,5 milliard d’euros annoncé et alloué sur cinq ans pour l’accessibilité.

L’analyse est plus acide du côté de Luc Gateau, président de l’Unapei, fédération d’associations qui défend les intérêts des personnes handicapées mentales et leurs familles. S’il salue l’intention de certaines mesures, comme la possibilité d’allonger la durée des contrats de travail des AESH à 35 heures (28 heures actuellement), « tout ceci est terriblement flou. Rien de concret, de chiffré et budgété n’a été annoncé », estime celui qui a refusé d’assister physiquement à la conférence. Depuis l’avertissement du Conseil de l’Europe – qui a épinglé la France le 17 avril sur le fait que les droits des personnes handicapées n’étaient pas suffisamment respectés – Luc Gateau aurait souhaité que se mettent en place des « observatoires des besoins », à l’échelle des territoires pour chiffrer et budgéter les besoins réels de personnes handicapées et leurs familles. Père d’une jeune femme atteinte de trisomie 21, il regrette aussi que « le handicap psychique, le polyhandicap et le handicap mental et intellectuel aient été mis de côté. L’accessibilité ne concerne pas que le handicap moteur, elle doit être universelle. » 

Guillemette de Préval – ombresetlumiere.fr -27 avril 2023

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