A l'ombre d'un mot
Bienveillance, n.f. -XIIe ; de bienveillant.
1. (jusqu’au XVIIIe) Sentiment par lequel on veut du bien à quelqu’un.
2. Disposition favorable à l’égard de quelqu’un.
Une dame âgée éprouve des difficultés pour traverser la rue où se bousculent les voitures, les vélos, les trottinettes et de nombreux passants. Spontanément, une jeune adolescente se dirige vers elle et lui propose de prendre appui sur son épaule pour traverser. Quelle bienveillance spontanée intergénérationnelle ! J’en suis émue.
La bienveillance, quel beau mot pour qualifier notre rapport à autrui, -il s’agit de veiller, ce qui est déjà beaucoup, mais de veiller bien, ce qui est encore mieux.
Veiller, c’est porter mon attention à l’état d’être de mon prochain sans l’envahir, mais en étant prêt à répondre à son besoin s’il le demande. Aux temps récents des grandes chaleurs, il nous était demandé de veiller aux personnes les plus vulnérables : nouveau-nés, enfants, personnes âgées, malades ou en situation de handicap. Ainsi la veille civique s’organise par des appels auprès des personnes concernées, car la veille doit se faire plus soutenue auprès des personnes fragiles. Alors, comment veillons-nous ? A quelle veille suis-je conviée ?
Mais veiller, c’est aussi veiller à ma présence au monde, à être parfois juste présente au présent, sans regretter le passé ni m’inquiéter de l’avenir. Être là. C’est parfois si difficile de rester présent dans la durée.
Une veille à laquelle sont invitées les fiancés qui doivent garder de l’huile pour tenir leur lampe allumée (Mt, 25), passage qui se continue par l’Evangile dit ‘des talents’. Pourrait-on, au début de cette année scolaire, entendre une invitation à faire grandir nos talents de « bonne veille » les uns envers les autres avec notre propre huile, celle de la bienveillance ?
Par Marie-Hélène Boucand. Médecin, docteur en philosophie, elle-même atteinte d’une maladie génétique rare. Dernier ouvrage paru, Traverser l’épreuve de la maladie, éd. Fidélité, 2022. Elle y déroule l’attention à ce que nous percevons, l’attention au corps qui se met à « parler », un travail qui consiste à « traduire » en mots les maux du corps. Pour Ombres & Lumière, elle livre chaque mois sa chronique « A l’ombre d’un mot ».