Dossier
« Il est urgent d’investir dans le domaine du handicap, source d’innovations immenses »
Porteur d’une paralysie cérébrale, Pierrick Courilleau a lancé le think tank Handicap République et société pour tenter de mettre en avant la question du handicap dans le débat des présidentielles. Pour Ombres & Lumière, l’Essonnien de 27 ans explique l’ambition de son projet.
Ombres & Lumière : Pourquoi avoir choisi de créer « Handicap République et société » ?
Pierrick Courilleau : Quand nous avons lancé ce groupe de réflexion, en juin dernier, c’est mû par l’idée que la crise sanitaire avait mis de côté les personnes en situation de handicap et les plus vulnérables. Emmanuel Macron avait pourtant fait du handicap une priorité de son quinquennat mais, hélas, la déception est grande. Il y a certes eu un élan – je pense notamment aux excellents travaux d’Adrien Taquet sur la simplification administrative – mais les résultats n’ont pas suivi. Aujourd’hui, les délais sont encore beaucoup trop longs pour constituer un dossier MDPH. En cas de déménagement, il faut en redéposer un… Bref, dans ces lourdeurs administratives et dans tant d’autres domaines, il faut aller plus loin, lever les freins. Avec mon équipe, composée à 80% de personnes en situation de handicap, nous avons fait 70 propositions dans différents domaines (éducation, économie, culture…) pour fixer un cap cohérent pour le prochain quinquennat.
O&L : En 2019, vous avez été assistant parlementaire auprès de la députée Stéphanie Atger (LRem) pendant quelques mois. Qu’est-ce qui nourrit ce désir de vous engager en politique ?
P.C. : J’ai toujours eu été intéressé par les questions d’accessibilité et d’innovation numérique pour faciliter le quotidien des personnes handicapées. Dès le collège, j’ai travaillé à la mise en place d’outils d’aide à la lecture pour les personnes dyslexiques. Et j’ai fait partie de divers projets par la suite. Je me déplace en fauteuil roulant depuis plus de vingt ans et ai eu la chance d’avoir une scolarité à peu près normale grâce au numérique, même si la rééducation y a pris beaucoup de place. J’ai obtenu un bac scientifique puis ai poursuivi dans le domaine de l’informatique et suis devenu consultant. Ce sont toutes ces expériences qui, peu à peu, ont forgé mes convictions.
O&L : Quelle stratégie pour que votre voix pèse dans le débat présidentiel ?
P.C. : Se faire connaître le plus possible ! En décembre, nous avons envoyé un courrier au Président de la République et sa femme. Nous n’avons pas eu de réponses pour le moment. Nous venons d’envoyer un courrier à chaque chef de groupe parlementaire à l’Assemblée nationale et au Sénat. Nous le ferons prochainement dans tous les quartiers généraux de campagne. Notre objectif, c’est de leur faire prendre conscience que le handicap est en enjeu pour la société tout entière. En France, on compte 12 millions de personnes en situation de handicap. En associant leurs proches aidants, c’est 1/3 de la population qui est concernée par ce sujet. Et rappelons que 90% des handicaps arrivent au cours de la vie. Il est urgent d’investir dans le domaine du handicap, source d’innovations immenses.
Recueilli par Guillemette de Préval, ombresetlumiere.fr
