Actus
« La force du handicap, c’est de réveiller l’amour »
Le directeur général du Collège des Bernardins, Laurent Landete, qui intervient avec son épouse Christel au colloque du 25 novembre, coorganisé par l’OCH (1), évoque un surcroît de vie puisé dans la souffrance. Dans un entretien préalable à l’événement, paru dans Ombres & Lumière, ce père de deux enfants touchés par le handicap mental et physique explique pourquoi la personne handicapée, à travers sa souffrance, révèle Dieu dans sa capacité à se laisser aimer. Extrait.
Vous avez connu la souffrance du handicap de vos deux aînés. Comment se relever face à cette violence ?
Quelques jours après avoir appris que nos deux aînés étaient touchés par une ataxie, un handicap mental et physique, nous avons découvert que nous attendions notre troisième enfant. Une autre angoisse s’est ajoutée à la violence que l’on vivait : on s’était dit que nous n’aurions plus d’enfants. Ce sont précisément deux choses qui nous ont sortis du trou : le soutien fraternel et la Parole de Dieu, alors que l’on se posait les questions « Pourquoi ? », « Pourquoi nous ? ». Tout de suite, une Parole de l’Écriture nous a touchés avec mon épouse : « Il ne faut pas dire pourquoi, mais tout doit être étudié en son temps, comme le dit l’Ecclésiaste ». Nous avons alors dissocié le pourquoi en deux mots : « Pour quoi ? », et cela nous a propulsés dans une autre dimension : Dieu vient visiter son peuple, reconnaît celui qui souffre. C’est en ce sens seulement que la souffrance peut trouver la lumière.
Comment avez-vous entrevu cette résurrection dans l’épreuve ?
Pour nous, la victoire a été l’accueil de la vie. Les médecins disaient que le risque était énorme pour nos futurs enfants. Nous avons ressenti un appel à faire confiance, passé par la Parole de Dieu. Au cœur de la souffrance, notre vocation a été de donner à nouveau la vie, « espérant contre toute espérance ». Notre troisième enfant n’est pas né malade, ni les suivants. La victoire, ce n’est pas nous qui la remportons, c’est Dieu qui la remporte. Au travers des personnes handicapées, il y a un surcroît de vie : elles-mêmes sont un signe de la victoire de la vie sur la mort. Le handicap n’exclut pas cette victoire finale, permanente, de la vie sur ce qui est mort en nous. La maladie peut être un chemin sur lequel se dessine la grâce. C’est en ce sens que la souffrance du Christ révèle l’amour. La force du handicap, c’est de réveiller l’amour.
N’est-ce pas choquant de parler d’un Dieu qui se révèle dans la souffrance ?
De quel Dieu parle-t-on ? D’un Dieu puissant, qui règle les problèmes d’un coup de baguette magique, ou d’un Dieu qui a pour seule nature de révéler l’amour ? Révéler l’amour, c’est la nature même de Dieu. L’amour ne peut se révéler qu’en donnant sa vie. Or, donner sa vie, c’est une épreuve. Au travers même de la souffrance, il y a un chemin de révélation pour tout homme. C’est dans le plus fragile, le plus handicapé, que Dieu se révèle, mais pas seulement bien sûr. On est face à deux choix. Le handicap peut révéler l’amour, mais aussi le contraire, c’est-à-dire la loi du plus fort… Lire la suite dans OL n°256 (novembre-décembre 2023).
Recueilli par Marilyne Chaumont
(1) Colloque aux Bernardins, à Paris : « Les personnes handicapées, révélatrices de Dieu ? ».