L’amour est toujours le plus fort
Vanessa Arcos est la maman de Valentine, 11 ans, porteuse de trisomie 21. Elle vient de publier « 1 chance sur 666 », un ouvrage dans lequel elle relate le chemin parcouru depuis la naissance de sa fille. A l’occasion de la journée de la trisomie 21, elle revient pour Ombres & Lumière sur ce que sa fille a changé en elle.
La naissance de Valentine n’a rien changé et en même temps, tout a changé. Rien car une naissance est toujours la rencontre d’une maman et d’un enfant et ce, quel que soit l’enfant. Mais cette naissance a été un choc, c’est sûr. Les premiers jours, on entre dans une autre dimension. On ressent une émotion brute qui vous brûle… L’irréel s’invite dans le réel. C’est d’une violence inouïe, il y a une sidération absolue. J’ai entendu le mot trisomie et très rapidement, le mot, handicap m’est venu à l’esprit. Mais je ne portais pas une trisomique, j’avais dans les bras un bébé que je trouvais magnifique ; un bébé qui me regardait, qui buvait son biberon, qui scrutait son environnement et qui avait les mêmes besoins que tous les autres bébés. En cela, ça ne change rien d’une naissance ordinaire.
J’ai gagné en profondeur
Certes, il y a toute la dimension logistique et médicale à gérer. La route est remplie de complications qu’il faut appréhender. S’adapter à la différence, faire autrement, demande une énergie folle… Mais j’aime Valentine et elle décuple mon envie de me battre pour elle. L’amour est toujours le plus fort ! Elle a révélé chez moi des trésors d’humanité. Avant sa naissance, je faisais des dons à des associations, je ne me garais jamais sur les places handicapées mais ma sensibilisation au handicap s’arrêtait un peu là. Grâce à Valentine, j’ai gagné en profondeur. J’ai toujours été passionnée par la philosophie ; je me suis toujours posé beaucoup de questions existentielles. Aujourd’hui, j’ai encore plus envie d’entrer dans ces sphères-là. A sa naissance, je travaillais dans les ressources humaines en tant que responsable de recrutement. J’ai tout de suite quitté mon emploi car je ne voulais pas laisser Valentine à une nounou ; je voulais l’aider à grandir, la protéger. Quand j’ai repris une activité, je me suis tournée vers de nouveaux domaines… Valentine m’a poussée à oser.
Un révélateur d’essentiel
Aujourd’hui, je suis rédactrice éditoriale et je m’épanouis pleinement. Cette envie d’écrire était là depuis toujours mais tapie derrière la porte… Valentine a ouvert les portes et les fenêtres. Elle est un révélateur de sincérité, d’essentiel et d’authenticité. Elle distribue sans compter. Elle ne juge jamais. J’admire aussi sa combativité. Elle a tout à fait conscience de sa différence et de ses difficultés mais elle est toujours satisfaite du moment présent, dès lors qu’elle est aimée et acceptée. Par son rythme lent, elle m’apprend la patience et l’humilité. On a tendance à être autocentré sur nos petits soucis et on ne perçoit pas la beauté du monde comme on devrait la voir… J’envie le regard pur et authentique de Valentine. La part commune de notre humanité est la fragilité. Nous sommes tous des fragiles qui avons à apprendre d’autres fragiles. Et Valentine est une merveilleuse pédagogue !
Propos recueillis par Christel Quaix, ombresetlumiere.fr – 19 mars 2021.
1 chance sur 666, Vanessa Arcos, Terre en ciel Editions, 14,90€.