Restons poly

Le métier de père

père et sa fille handicapée
©Istock

Parfois, je rencontre des personnes que j’ai déjà vues et qui me disent : « Oh oui, je vous connais, vous êtes le père de… Marie Océane ». Il est certain que, dans la rue, celle qui attire le regard des autres, c’est Marie Océane dans son fauteuil.

Moi, je suis son père, celui qui la promène, qui veille sur elle, qui explique calmement le handicap de Marie Océane aux enfants dont le regard insistant gène leurs parents. Je suis celui qui partage avec Caroline le soin de l’habiller, de la changer, de la faire manger, de la laver, de la porter pour la mettre dans son fauteuil ou pour l’en sortir, de la divertir par des jeux, des films ou de la musique, de faire les conduites chaque fois que nécessaire.

Comme pour un tout petit enfant en somme. Oui mais nous, c’est pour notre grande fille, depuis 24 ans.

Et puis, nous avons aussi les contraintes propres à son handicap : mixer sa nourriture et gélifier ses boissons, lui donner tous ses médicaments matin et soir, passer des semaines à choisir son nouveau fauteuil et toutes les aides techniques, veiller jour et nuit à son état de santé et filer à l’hôpital dès qu’il se dégrade car, avec elle, cela va très vite, et se battre auprès des soignants pour qu’ils s’adaptent aux difficultés spécifiques liées à son handicap, faire les dossiers pour la MDPH, la CAF, … et réparer tout ce qui casse.

Je suis aussi Président du CVS de sa MAS (*) pour tenter de mettre de l’huile dans les rouages entre les parents et les professionnels, et veiller au bien-être des personnes accueillies …

Et, par ailleurs, je bénéficie de toutes ses qualités, de ses gestes d’amour, de ses sourires qui remercient, de ses câlins du matin, de la joie de voir sa joie dans les choses simples de la vie : un bon repas, aller se promener, se coucher avec elle sur son tapis et jouer avec elle, retrouver ses amis de Foi et Lumière.

Alors oui je suis le père de Marie Océane… et aussi le père de Thibault, Aurélien, Robin et Domitille, le beau-père de Fiona, Sophie et Maria et même, depuis peu, le grand-père de Colette chez Thibault et Fiona et dans l’attente de la naissance prochaine chez Aurélien et Sophie. 

Et accessoirement je travaille aussi pour nettoyer les eaux sales et protéger l’environnement.

J’aimerais n’être pas que « le père de » mais il est certain que, désormais, c’est Marie Océane qui mobilise le plus mon temps et mes pensées.

Oui, je suis le père de… mais je suis tout simplement un homme. D’ailleurs, cela sonne mieux, n’est-ce pas ?

Hubert Sailllet, ombresetlumière.fr – 19 novembre 2020

(*) CVS = Conseil à la Vie Sociale et MAS = Maison d’Accueil Spécialisé

Partager