Les pères à cœur ouvert

Un papa prend dans ses bras son fils handicapé.
@ Adobe Stock

BF : On parle souvent des mamans d’un enfant handicapé, on entend moins parler de la façon dont les papas vivent le handicap de leur enfant.

« Je suis une version bonifiée de moi-même. Louise a fait de moi un meilleur papa. Je suis plus attentif à chaque enfant, plus tolérant, moins égoïste… ». Il s’appelle Rémy, celui qui parle ainsi. Il est papa de deux enfants, dont l’ainée, Louise, est trisomique. C’est dans la revue Ombres & Lumière qu’il témoigne, dans un dossier passionnant, « les pères à cœur ouvert »,

BF : Que découvre-t-on dans ces cœurs de pères d’enfants malades ou handicapés ?

On y découvre combien pour nombre de ces papas, l’irruption du handicap vient souvent balayer brutalement le scénario idéal qu’ils avaient imaginé, au point parfois de rejeter cet enfant : « Ma fille ne correspondait pas à l’image que je m’en faisais. J’ai eu peur ; je n’en voulais pas » témoigne Fabien Toulmé, auteur de la BD « ce n’est pas toi que j’attendais » chez Delcourt. Même si les premières réactions ne sont pas toujours aussi violentes, on constate que pour tous, le handicap vient brouiller la fonction paternelle. On sort de l’image trop répandue de l’homme fort qui assume en toutes circonstances… Comment tisser ce lien mis à rude épreuve au démarrage ? Comme si les pères avaient à adopter cet enfant tellement différent de ce qu’ils avaient envisagé. « On se sent amputé, on n’est pas papa comme on voudrait l’être » témoigne Philippe Idiartegaray, auteur de « Mon fils, ce petit héros », chez Salvator.

L’enfant handicapé fait souvent preuve d’un réel talent pour révéler à ce papa perdu comment exercer la paternité.

BF : mais alors comment font-ils pour tisser ce lien avec cet enfant si différent, au point de le nommer « mon héros »

C’est un lent chemin de rencontre et d’attachement mutuel, Valentin, où peu à peu, le handicap s’estompe pour laisser place à l’enfant. On découvre que l’enfant handicapé fait souvent preuve d’un réel talent pour révéler à ce papa perdu comment exercer la paternité : « J’ai désappris une façon d’être père, et je me suis laissé instruire par David » nous dit Philippe. Comme si ces enfants différents savaient tirer de ces cœurs de pères tout l’amour dont ils ne se croyaient pas capables : « il suscite en moi une bienveillance, une estime, et finalement une joie d’aimer incroyables » témoigne encore Philippe.

Mais ce chemin pour devenir père est semé d’embuches et de tentations, à commencer par celle de fuir. Nombre d’entre eux reconnaissent combien ils ont besoin des autres, et notamment de rencontrer d’autres papas d’un enfant handicapé, avec qui partager sans jugement aucun les doutes, les émotions, les larmes parfois, les questions aussi.

C’est pour cela que l’OCH propose à ces pères un week-end de rencontre. Il a lieu à Paris, ces 13 et 14 novembre. On peut encore s’y inscrire sur le site de l’OCH. Jamais facile pour un papa de se décider à sortir de lui-même pour venir à une telle rencontre. Alors, amis, épouses, aidez-le à faire le pas. C’est une occasion unique pour vivre cette expérience que Patrick a si bien résumée lors d’un précédent week-end : « Je suis venu à une rencontre de pères, je repars avec des frères ».

Philippe de Lachapelle sur Radio RCF – 8 novembre 2021

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