Une vie de papa

Rencontres salutaires

Portrait de Guillaume Kaltenbach

Ma vie de père s’enrichit des rencontres avec d’autres parents d’enfants autistes. Certaines d’entre elles sont organisées, dans le cadre d’associations ou de parents d’élèves, et les échanges se font très vite car on est en terrain connu. Mais ce sont les rencontres imprévues qui sont pour moi les plus savoureuses. Je pense à ce client avec qui j’entretiens de bonnes relations professionnelles depuis longtemps : à l’occasion d’un café matinal, nous nous sommes rendu compte que nous étions dans la même situation de père concerné par l’autisme d’un de nos enfants. À la relation professionnelle s’ajoute une connivence qui rend nos liens désormais différents.

Quand je rencontre d’autres parents, les préliminaires vont vite – le point de convergence est puissant et vite absorbant. Pour cerner où en est chacun, l’échange des repères se fait à toute allure : l’âge de l’enfant, la forme de l’autisme, le moment du diagnostic, le parcours scolaire ou en établissement. On en vient inévitablement à décrire les caractéristiques de notre enfant au travers toute une série d’alternatives binaires sur certains qualificatifs : verbal ou non-verbal, violent, incontinent, scolarisé. Vient le moment où l’on échange sur les anecdotes incroyables ou effroyables : avez-vous mis un cadenas sur la porte de votre frigo ? Est-ce qu’il se cogne la tête contre les murs ? Écoute-t-elle vingt fois le même morceau de musique par jour ? Sans oublier de partager les répercussions du handicap sur notre vie professionnelle. Reste un sujet délicat, pour ne pas dire tabou, le handicap et la relation de couple. Il est difficile d’en parler, surtout lorsque je sens que la gestion du handicap repose plus sur un des deux parents, et que l’autre donne l’impression de fuir. J’aimerais aider sans interférer.

Vous non plus vous ne comprenez pas pourquoi la caisse d’allocation familiale ne verse plus rien ? Les expériences de chacun comblent le sentiment de grande solitude qu’on éprouve face à la montagne du handicap. On se sent compris face à la pénibilité des démarches administratives, médicales ou scolaires. La solidarité émerge de ces rencontres. Certaines aboutissent à la naissance de véritables amitiés. Je pense à ces parents, dont les enfants me paraissent plus lourdement handicapés que notre fille, et qui nous envoient mois après mois des messages de réconfort pendant les périodes où les choses sont plus difficiles avec Roxelane. J’ai souvent le sentiment de ne pas être à la hauteur de l’attention qu’ils ont manifestée. Et je voudrais les remercier.

Guillaume Kaltenbach, ombresetlumiere.fr – 22 avril 2024

Guillaume Kaltenbach est père de trois enfants dont Roxelane, 14 ans, atteinte de troubles du spectre autistique. De confession protestante, ce chef d’entreprise est impliqué dans différentes initiatives professionnelles et bénévoles visant l’amélioration de l’inclusion des personnes en situation de handicap.

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