Un long chemin vers le consentement

Thaïs
Prise dans un combat intérieur, Marie a vécu une grossesse difficile jusqu’à la naissance de Thaïs, née avec une trisomie 21 – © D.R. pour Ombres & Lumière

Marie était très jeune quand elle a appris que sa deuxième fille était atteinte de trisomie 21. Maintenant que Thaïs a 6 ans et deux autres frères, elle se souvient de sa longue révolte.

« Le fœtus est bien porteur de trisomie 21. » Dans le bureau du médecin qui, à la suite de l’amniocentèse, nous confirmait le diagnostic, j’étais comme une loque. Moi qui avais jusqu’ici plein de principes et ne voulais pas entendre parler d’interruption de grossesse, je ne savais plus. J’étais complètement révoltée et j’en voulais à la terre entière : pourquoi nous ? Pourquoi moi alors j’étais tellement jeune ? J’avais 25 ans et les années heureuses étaient derrière moi. Nous ne serions pas une famille normale. Ma vision du bonheur s’effondrait.

J’étais prise dans un combat intérieur : d’un côté, je ne pouvais pas supprimer mon enfant que je sentais bouger en moi, sous prétexte qu’il n’était pas comme tout le monde, de l’autre, je me disais que je ne supporterais pas un enfant trisomique, que c’était trop pour moi. J’ai vécu dans ce calvaire toute ma grossesse. Je ne sortais plus de chez moi, je n’étais qu’une larme. Heureusement, notre fille aînée, âgée de 18 mois, me motivait pour tenir. Certains matins, en me réveillant, j’étais sur le point de prendre rendez-vous pour l’IMG.

Mon mari Amaury, se posant moins de questions, m’a permis de ne pas aller jusqu’au bout de cette démarche, que, de toute façon, j’étais incapable de franchir. Parfois, je vivais comme une injustice le fait d’être catholique pratiquante, avec l’impression que cela m’entravait dans ma liberté. Je ne pouvais plus entrer dans une église ! Ma conscience m’interdisait de demander l’avortement, et en même temps je vivais comme une pression les incitations de mon entourage à garder cet enfant. Et si j’avortais, toute ma vie, je devrais supporter le regard des membres de nos familles au courant…Bref, je ne me sentais pas libre. Une seule personne, toutefois, m’a dit ce que j’avais besoin d’entendre : « Tu fais ce que tu veux. Tu es libre. » 

Cet état a duré jusqu’à la naissance de Thaïs, à la maternité catholique Sainte-Félicité (Paris), qui a été très douloureuse. En regardant le crucifix accroché sur le mur, je demandais au Seigneur de faire un miracle, que le bébé naisse sans trisomie… J’ai refusé de prendre le bébé contre moi, et elle a été transférée en néonatalogie en raison de son problème cardiaque. Le lendemain, je ne voulais toujours pas aller la voir, mais Amaury m’a entraînée. Une sœur de la maternité a mis Thaïs dans mes bras et m’a proposé de la changer. Je l’ai posé sur la table à langer et les gestes sont venus d’eux-mêmes naturellement. C’était un bébé, mon bébé. Quand je l’ai reprise dans mes bras, c’était ma petite fille. Peut-être le miracle que j’attendais.

Aujourd’hui, je suis profondément convaincue, qu’en ce qui concerne notre famille, nous avons « choisi » – même si ce n’est pas vraiment un choix que d’avoir un enfant handicapé – la voie la plus facile et la meilleure pour nous en sortir et être heureux. Nous le ressentons tous les jours.

Marie 

Mes conseils pour accompagner une maman enceinte d’un enfant trisomique :

  • Ecouter ses états d’âme, ses peurs, sa révolte sans la juger
  • Accepter de se taire et de ne pas donner de conseils
  • La laisser libre. Par son attitude, la personne à l’écoute sera un témoignage. Ombres et Lumière n°193

Ombres et Lumière n°193

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