Troubles Psy

VRAI/FAUX – Contre les idées reçues sur la spiritualité et les troubles psy

Le père Bernard-Marie Geffroy a longtemps été aumônier en psychiatrie. Il a fondé à Aix-en-Provence l’Accueil Raphaël, un accompagnement spirituel et psychologique. Le temps d’un vrai/faux, il décrypte certaines idées reçues.  

Il est trop difficile pour un prêtre d’accompagner des personnes avec une fragilité psychique : FAUX 

Mais il y a encore une frilosité de la part de l’Eglise. Avec les scandales d’abus sexuels, beaucoup craignent d’accompagner des personnes fragiles psychiquement car on pourrait les soupçonner d’user d’une emprise. Un prêtre me disait ne jamais prier avec les personnes qu’il accompagnait car il avait peur d’un « débordement affectif ». Certes, il faut être conscient des contre-transferts que peuvent faire ces personnes mais l’accompagnement spirituel est avant tout une relation. C’est cela qui fait progresser.

La foi est un soutien pour les personnes malades psychiques : VRAI

J’observe un grand désir spirituel chez elles. Le Seigneur est d’abord venu pour les malades. L’Amour du Christ va aux marges. Quand j’étais aumônier à Sainte-Anne, un patient m’avait interpellé après la lecture du texte du Deutéronome : « Tu aimeras ton Dieu de toute ta force, de toute ton âme, et ton prochain comme toi-même ». Ce patient m’a interrompu : « Comment voulez-vous que j’aime mon prochain si je n’arrive déjà pas à m’aimer moi-même ? » Il a ajouté que le regard des autres l’enfermait, qu’il n’était qu’un malade à leurs yeux. Après un silence, il a poursuivi : « Alors, je me plonge dans le regard de Dieu et je m’aime un peu moins mal. Et j’aime un peu moins mal mon prochain. » Je n’ai rien eu à ajouter, l’Esprit saint avait œuvré. 

L’exorcisme est parfois nécessaire : VRAI

C’est vrai pour des personnes sous forte emprise ou ayant été abusées par exemple. Mais cela reste très rare et il existe d’autres voies, comme la prière de libération. Elle permet de couper la personne des liens mauvais, en rapport avec son histoire. Mais si la personne est psychotique, elle doit d’abord être stabilisée. 

Les psychiatres se méfient du côté spirituel : VRAI

Les psychiatres ont une peur immense du délire mystique, car il est redoutable. Ils ont tendance à se méfier du prêtre ou de l’aumônier, se disant qu’ils vont exacerber le délire mystique. Un jour, un psychiatre m’a appelé pour un jeune de son service qui voulait faire sa première communion. Il lui a refusée par crainte qu’il ne parte dans un délire. Je lui ai répondu que justement, l’un des remèdes à était de vivre une liturgie incarnée.

Dans le délire, c’est le contraire, la personne « décolle », elle est ailleurs… Je n’ai pas voulu m’opposer et le jeune a attendu sa sortie. Il a reçu ce sacrement dans ma paroisse. Ces psychiatres-là, je les appelle les « chimiatres ». Comme si, pour eux, tout était chimique et corporel. Ils considèrent à peine le psychologique, et ne parlons pas du spirituel ! Les patients souffrent de cette attitude. Ils ont une forte sensibilité et perçoivent lorsqu’ils sont réduits à cette seule dimension. 

Recueilli par G. de Préval

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