Dossier

Handicapée et missionnaire

Carolina à Paray-le-Monial
Carolina, à Paray-Le-Monial en juillet 2021, à la session « Avec ou sans handicap ». © C. Gandon

Carolina Leitao, 35 ans, est porteuse d’un handicap moteur et visuel. D’une foi enthousiaste, elle interviendra au Congrès Mission, à Toulouse, les 2 et 3 octobre prochains.

A la question « Le handicap est-il un frein ou une force pour la mission ? », j’aurais tendance à dire les deux : un frein puisque nous sommes limités dans notre capacité d’agir, et une force pour les raisons que je vais vous détailler.

S’accueillir pour rayonner

Le missionnaire est celui qui vit ce qu’il dit, et qui ainsi le transmet. Il me semble que ce qui frappe dans une personne handicapée, c’est d’abord son corps blessé ou différent. C’est donc à mon avis par l’accueil de ce corps pour ce qu’il est en vérité et par l’offrande, en union au corps blessé de Jésus, que la personne handicapée a toutes les chances de se laisser unifier. Ainsi réconciliée, elle est plus à même à rayonner la joie de l’enfant de Dieu qu’elle est, créée à son image et appelée à la liberté.

C’est ainsi que pour ma part par exemple, je n’ai aucune honte à porter le scapulaire de façon très visible ; que certains n’ont pas honte de parler de leur foi dans les transports, dans un bar (j’en fais partie) ou à crier le nom de Jésus au beau milieu de la rue – je le vois parfois avec certaines personnes déficientes intellectuelles ou porteuses d’un handicap psychique.

Cultiver ses relations et amitiés

La « grâce » du handicap, c’est la dépendance. Cette dépendance nous donne de côtoyer énormément de personnes qui nous aident pour les besoins les plus primaires. Pour la mission d’évangélisation, c’est très précieux parce que ces personnes nous accompagnent dans nos activités pastorales et ecclésiales ; ce qui est pour beaucoup une grande première (je prends comme exemple mes aides à domicile qui assistent ainsi notamment à la messe), mais elles bénéficient aussi du fruit direct de notre vie de prière par le simple fait de nous côtoyer.

J’ai beaucoup d’accompagnants de confession musulmane qui ont été édifiés par le temps que je consacre à la prière (oraison et Office liturgique) car je suis en formation dans le tiers-ordre du Carmel). De plus, il me semble que le témoignage d’une personne qui a le souci de ses aidants, comme c’est mon cas, par des petites choses comme par exemple proposer de boire un café, a autant de force que de grands discours.

Il me semble également que les personnes handicapées cultivent l’art de fédérer de véritables amitiés, fidèles, à l’écoute et généreuses dans le don de soi. Cette force relationnelle s’inscrit vraiment dans ces paroles de Paul : « Je mettrai mon orgueil dans mes faiblesses pour que la puissance du Christ se développe en moi ».

Mettre ses talents au service

Tout le monde a un talent, au moins un… Il n’y a donc pas de raison pour qu’une personne handicapée en soit dépourvue. Mais, comme dans le monde des valides, c’est le talent qui prime sur l’être, je l’évoque ici en dernier. Il est vrai aussi que lorsque l’on est porteur d’un handicap, il est difficile, d’une part de connaître son talent, et d’autre part de trouver la bonne façon de le mettre au service des autres.

Nous sommes bien souvent prisonniers des regards qui nous enferment dans notre handicap et nos limites. Rares et précieuses sont les personnes qui trouvent la bonne façon de nous aider à le valoriser, avec un savant mélange de bienveillance, et d’amour (accueil de l’autre pour l’aider à grandir).

Carolina, ombresetlumiere.fr – 13 septembre 2021

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