Sur les lèvres
Mes compagnons de route
Ils sont partout les livres ; confortablement installés dans les bibliothèques, sur le devant des vitrines de magasins, sur nos tables de chevet, et parfois cachés entre deux meubles. Et pourtant, rares sont les personnes que je croise aujourd’hui dans le métro ou le bus qui tiennent encore entre leurs mains un « bouquin ». A la place, les smartphones ont pris une place démesurée dans nos vies, et ce parfois malgré nous.
Je me souviens du temps où je lisais quatre à six livres par semaine, de ces heures qui défilaient le nez entre les pages sans avoir conscience du temps qui s’écoulait, du bonheur au moment de refermer la dernière page et de ce sentiment de plénitude après avoir fini une histoire prenante où je comprenais l’intrigue de A à Z, puisqu’elle se trouvait sous mes yeux.
Les livres ont été les compagnons de route fidèles qui m’ont ouvert la porte au monde. Alors que, petite et n’entendant pas, je ne saisissais pas toujours ce qui se passait autour de moi, ils ont été la clé me donnant accès à la compréhension de l’histoire des hommes, de notre temps et des siècles passés. De fil en aiguille, ils m’ont appris à décrypter les codes qui régissent nos sociétés. Des codes qui m’échappaient dans la vie réelle, faute de vocabulaire ou de compréhension des mots énoncés.
Mes parents avaient bien compris le pouvoir des livres. Ce n’était pas grave si je ne savais pas parler ni entendre correctement, « tant qu’elle lit ! ». Ils m’obligeaient à souligner les mots qui m’étaient inconnus pour me les expliquer ensuite. Je me souviens encore de la fois où j’avais demandé ce que signifiait le verbe « soupirer », et du visage de ma mère mimant, en soufflant et haussant les épaules en guise de démonstration…
Citées de nombreuses fois, les vertus de la lecture sont incontestées puisque démontrées de façon scientifique. Ils sont d’autant plus précieux lorsqu’un sens nous manque – comme l’audition – et viennent le combler en venant à nous, avec leurs histoires fictives, romancées, historiques. Par la description qu’ils nous font du monde et leur universalité, ils développent en nous une imagination sans bornes.
De nos jours, lire un livre dans le métro ou le bus, c’est un peu un acte de liberté, de résistance face à la puissance des écrans. Par la visibilité donnée au livre via sa couverture, on partage indirectement aux gens qui nous entourent ce qu’on lit. La lecture est un effort fastidieux qui nous demande la force de caractère d’aller jusqu’au bout des pages, même lorsque l’histoire nous dérange. Lire, c’est aller au devant d’une véritable ouverture d’esprit (à condition de diversifier les types de lecture) et nous amène à construire un cheminement de pensée qui nous est propre.
Quelque part, c’est grâce aux livres que j’en suis arrivée au métier de journaliste aujourd’hui. Et je suis d’autant plus reconnaissante vis à vis de mes parents de m’avoir donnée cette immense liberté, en plaçant des livres entre mes mains de petite fille.
Aliénor Vinçotte, ombresetlumiere.fr –