Bégaiement, un handicap à surmonter

Little boy at speech therapist office

Nicolas Entz : Le bégaiement touche beaucoup de monde, mais on n’en parle bien peu… peut-être parce que précisément ça touche la parole ?

« Je travaille actuellement avec 25 bègues, et je vais t’aider aussi…on va tout faire pour que les moqueries des autres enfants s’arrêtent…». L’homme qui parle ainsi n’est autre que le futur président des Etats Unis. C’était en début d’année, Joe Biden, en pleine campagne électorale, s’est adressé à un jeune adolescent bègue. « Il m’a dit que nous faisons partie du même club -témoigne le garçon- c’est vraiment génial que quelqu’un de bègue comme moi puisse devenir président ».

Nicolas Entz : Ainsi, Joe Biden est bègue ?

Oui, Nicolas, depuis sa petite enfance. Il a mené un combat personnel pour surmonter ce handicap, et il en a fait une cause pour laquelle il s’est engagé, car dit-il « le bégaiement est le seul handicap qu’on utilise pour humilier quelqu’un ». Il sait de quoi il parle, lui qui fut plus d’une fois moqué sur son élocution par ses adversaires, pour mettre en doute son agilité mentale. Toute personne bègue peut témoigner des moqueries dont elle a été l’objet à tout âge, causant une profonde souffrance, doublée d’une perte de confiance pourtant indispensable pour progresser.

On apprend à vivre avec ce handicap, à le surmonter, avec plus ou moins de succès selon les personnes, mais un enjeu majeur est l’estime de soi.

Le bégaiement n’est pas une maladie dont on guérit. C’est un handicap, invisible, mais qui concerne beaucoup de monde, vous l’avez dit, Nicolas. Un pour cent de la population environ est bègue : en France ce sont plus de six cent mille personnes, principalement des hommes.

C’est un trouble qui touche la communication plus que la parole elle-même, comme en témoignent ces acteurs, qui n’ont aucune difficulté sur scène, mais qui bégaient dans la vie. Les causes sont mal connues, plurifactorielles, génétiques, neurologiques, psychologiques…

On apprend à vivre avec ce handicap, à le surmonter, avec plus ou moins de succès selon les personnes, mais un enjeu majeur est l’estime de soi. « J’ai appris à ne plus être dans le combat constant, mais dans l’amour de moi-même » -témoigne Mounah, consultant. On sait que plus on accompagne tôt l’enfant, notamment par l’orthophonie, plus celui-ci apprendra à parler sans bégayer.

Nicolas Entz : Y-a-t-il d’autres personnalités de premier plan à être bègue ?

Oui, Nicolas, d’illustres personnages ont précédé Joe Biden, manifestant eux aussi combien ce handicap peut être surmonté : Einstein, Churchill, Napoléon… et bien avant eux Moïse ! Moïse qui prétexte son bégaiement pour se soustraire à la tâche que Dieu lui confie de libérer le peuple hébreu d’Egypte. Dieu lui adjoint alors son frère Aaron. « Tu lui parleras et tu mettras mes paroles dans sa bouche. Et moi, je suis avec ta bouche et avec sa bouche ». Une belle complémentarité qui devrait tous nous inspirer pour que le bégaiement ne soit jamais un obstacle à répondre à un appel d’où qu’il vienne !

Philippe de Lachapelle sur Radio Notre Dame – 29 décembre 2020

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