La fin de vie, un débat qui nous concerne tous
VD : La fin de vie est un sujet récurrent dans notre société. Il est souvent difficile d’en débattre, tant il est chargé d’émotions bien légitimes. Et pourtant, nous sommes tous concernés. Nous avons le devoir de nous faire une idée.
« Il me faut écrire pour ceux dont l’agonie n’est pas télévisée, les sans-voix, les gens ordinaires. Ceux qui ne disposent pas d’appareil militant. Ceux dont aucun chanteur, comédien ou écrivain ne vient soutenir la cause. Ceux qui n’intéressent pas les médias parce que leur agonie est trop humble, trop ordinaire. » Ces mots sont de Erwan Le Morhedec, dans l’introduction de son livre « Fin de vie en République – Avant d’éteindre la lumière », aux éditions du Cerf. Avocat, blogueur, chroniqueur, Erwan Le Morhedec est proche depuis de nombreuses années d’associations de soins palliatifs. Il a décidé d’éclairer le débat sur l’euthanasie, qui revient régulièrement sur le devant de la scène, notamment lorsque des people choisissent de médiatiser la mort d’une personne en demande d’euthanasie.
VD : Comment l’auteur a-t-il travaillé le sujet ?
Il a beaucoup écouté, pour écrire ce livre, Valentin. Il a écouté les récits de ces gens ordinaires en fin de vie ou atteints de maladies dégénératives incurables, avec leur espérance qui ne faiblit pas d’une vie bonne. Il a écouté les récits empreints de bienveillance et de compétence de ceux qui les accompagnent en soins palliatifs, jour après jour, sans faire de bruit : aides-soignants, infirmiers, médecins, bénévoles, tous ont une place unique pour que la vie soit recueillie à tout instant. Il a écouté les familles, prises dans des émotions si contradictoires, qui ont bien besoin de les déposer pour trouver leur chemin près de leur proche. Il a regardé ce qui se vit en Belgique où l’euthanasie est pratiquée quotidiennement, dont on voudrait tellement s’inspirer en France, alors même que les dérives s’y multiplient comme si c’était un engrenage infernal. Il a écouté ceux qui en France prêchent pour l’euthanasie, au motif que cela ne retirerait rien à personne.
On comprend qu’en réalité, ni la liberté, ni l’égalité, ni la fraternité, ne sortiraient gagnantes de l’euthanasie, qui deviendrait, notamment pour les plus fragiles, les plus pauvres, la voie ordinaire vers la mort quand ils souffriraient d’une affection physique ou psychique.
VD : Est-ce si vrai que cela ? S’agit-il seulement d’une liberté personnelle qui n’engage personne d’autre que moi ?
Rien n’est moins sûr , Valentin ! Car on comprend dans ce livre que l’euthanasie engage bien au-delà de la seule personne, à commencer par ses proches, mais aussi bien évidemment les soignants. Elle est comme un poison à diffusion lente qui tue aussi les soins palliatifs, dont la mission se résume par cette phrase magnifique « Tout ce qu’il reste à faire quand il n’y a plus rien à faire ». On comprend qu’en réalité, ni la liberté, ni l’égalité, ni la fraternité, ne sortiraient gagnantes de l’euthanasie, qui deviendrait, notamment pour les plus fragiles, les plus pauvres, la voie ordinaire vers la mort quand ils souffriraient d’une affection physique ou psychique.
Alors même que certains candidats aux prochaines présidentielles semblent vouloir inscrire l’euthanasie dans leur programme, ce livre d’Erwan Le Morhedec aide à se faire une opinion, mais aussi à argumenter raisonnablement, lorsque nous en parlons dans nos cercles familiaux ou amicaux.
Car nous ne pouvons rester sans voix, ce débat nous concerne tous!
Philippe de Lachapelle sur Radio Notre-Dame – 8 mars 2022