Nous offrir nos blessures pour une dynamique d’entraide

Nicolas Entz : On connait la parabole du bon samaritain. Cet homme qui s’arrête en chemin pour sauver un homme blessé. Il y a plusieurs façons de lire et de recevoir cette Parole de Dieu

« Nous les personnes handicapées, malades, dépendantes, nous aidons les autres à être des bons samaritains ». Ces mots sont de Jean-Baptiste Hibon, Infirme Moteur Cérébral, et diacre de l’Eglise de Lyon. Il témoigne ainsi au cours d’un temps spirituel de carême que l’OCH a mis en place sur internet pour un public divers, parmi lesquels de nombreuses personnes malades, handicapées, fragiles, blessées de la vie. Vous l’avez dit Nicolas, le bon samaritain est celui qui choisit de s’arrêter pour prendre soin d’un homme blessé trouvé sur le bord de la route. Il s’engage alors, en lui fournissant soin, gite et couvert, jusqu’à son complet rétablissement. Deux autres notables, eux, avaient auparavant préféré se détourner.

Nicolas Entz : La distribution des rôles parait assez simple à comprendre

Oui, Nicolas, et on pourrait s’en satisfaire : il y aurait ainsi d’un côté les personnes malades, handicapées, qui seraient sur le bord de la route, et de l’autre côté , les bien-portants, invités à s’arrêter et à prendre soin des premiers. Un ordre des choses bien établi qui conviendrait à tout le monde. Les bien-portants auraient juste à faire l’effort -non négligeable- de ne pas céder à la tentation de se détourner.

Mais Jean-Baptiste Hibon ne s’arrête pas là, qui ajoute de sa voix lente et hachée – son handicap l’oblige à articuler chaque mot- : « Nous, personnes handicapées, nous aidons aussi les autres à reconnaitre leur propre blessure ». Et le diacre d’inviter chacun, et pas seulement les personnes handicapées, à s’identifier à l’homme blessé sur le bord de la route, et de considérer qu’il a besoin, lui aussi, d’être aidé et soigné. Car dit-il en conclusion : « c’est la blessure de chacun qui permet de découvrir la richesse de la fraternité ».

Nicolas Entz : On devine une dynamique d’entraide mutuelle infinie ?

Oui, Nicolas, et elle est initiée par les plus fragiles. Chacun peut se reconnaitre à la fois aidant et aidé, pour la plus grande joie de tous. Le Pape François dans l’encyclique « la Joie de l’Evangile » écrit : « Si je réussis à aider une seule personne à vivre mieux, cela justifie déjà le don de ma vie. –Il ajoute- Nous atteignons la plénitude quand nous brisons les murs ».

Ainsi, les personnes qui passent par la pauvreté, l’échec, le handicap, l’exclusion, sauvent notre monde, parce qu’elles permettent de briser ces murs qui nous séparent les uns des autres, de nous libérer de nos égoïsmes, nos enfermements, nos satisfactions bien éphémères, pour nous ouvrir à quelque chose de durable, qui a un gout de plénitude, un goût d’éternité de l’ordre du Royaume, un goût de Pâques.

Philippe de Lachapelle sur RND – 06/04/2021

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