Frères et sœurs de personnes handicapées, une vie singulière ?
Chronique de Florence Gros, directrice de la Fondation OCH, sur Radio Notre Dame – 1 octobre 2024
Depuis 1996, l’OCH organise des rencontres pour les frères et sœurs de personnes handicapées ou malades psychiques avec des propositions assez diverses selon les âges. Et depuis la création de l’OCH – plus de 60 ans – des frères et sœurs s’adressent à l’équipe Ecoute & conseil pour échanger, parler, par exemple de leurs difficultés à construire leur vie ou demander des conseils pour accompagner la vie affective de leur proche malade … ces frères et sœurs ont souvent plein de questions parce que très investis. Ils viennent à l’OCH seuls, en fratrie, et parfois avec celui qui est handicapé pour réfléchir ensemble. Dernièrement c’est Anne, une femme de 70 ans, qui a appelé. Elle a attendu toutes ces années pour confier sa relation complexe à sa sœur. Parler des frères et sœurs est un vrai sujet, les inviter à ne pas rester seuls est capital.
Simon : Toutes ces rencontres donnent à l’OCH une belle expertise. Qu’est-ce qui les différentie des autres frères et sœurs non confrontés au handicap ou à la maladie d’un proche ?
Comme toute personne, ces frères et sœurs éprouvent des émotions. Mais la palette de leurs émotions est sans doute particulièrement large avec des sentiments contradictoires entremêlés. Je vous donne un exemple. Je participais cet été à un groupe de parole avec des adolescents qui ont un frère ou une sœur trisomique. Maxime dit de façon abrupte : « Je ne vois rien de positif chez mon petit frère. Il m’empêche de dormir le matin, il ne fait que des bêtises et du bruit, je ne peux même plus sortir avec les copains quand maman est seule avec lui parce qu’elle a besoin de moi … ». Juliette, surprise par la réaction impitoyable de Maxime, réagit. « Tu ne vois vraiment rien de positif, tu ne l’aimes pas ? » et Maxime répond avec la même spontanéité : « Ah si je l’adore mais il est exaspérant ». Cette relation d’« amour/haine » n’est pas rare et parfois culpabilisante. J’entends aussi beaucoup de compassion et d’inquiétude, de la frustration, de la colère, de la fierté … Avoir un frère ou une sœur avec des besoins spéciaux est une expérience unique qui comporte des défis et des avantages. L’important me semble-t-il est de les écouter, de les accompagner pour qu’ils ne se sentent ni négligés, ni isolés, ni enfermés mais encouragés.
Simon : Vous parlez de défis et d’avantages. Devenus adultes, ces frères et sœurs développent-ils des compétences particulières ?
Chaque fois que je rencontre des frères et sœurs devenus adultes, je repère des trésors de qualité. Fiabilité, attention aux autres, loyauté, générosité, compassion, persévérance, serviabilité, patience … et j’en oublie certainement. Pour qu’ils prennent conscience et s’émerveillent de toutes ces belles aptitudes, il faut parfois les aider et ne pas attendre qu’ils aient 70 ans comme Anne. Samedi 12 octobre, à Boulogne Billancourt dans le 92, les frères et sœurs de 7 à 18 ans se retrouvent entre pairs autour de témoins, de jeux et d’activités par tranche d’âges. Invitons-les largement à participer à cette rencontre où tout est organisé pour eux. Tous les renseignements sont sur le site de l’OCH. www.och.fr. L’inscription est obligatoire. Et l’équipe Ecoute & conseil est un soutien fiable sur lequel les frères et sœurs peuvent aussi compter.
Chroniques animées par par Simon Tatreaux, journaliste et présentateur de Radio Notre Dame.