« Je suis célibataire et souhaite léguer une partie de mes biens à la Fondation OCH et l’autre partie à mes deux neveux. Comment dois-je rédiger mon testament ?»

Première question à se poser : suis-je libre de faire ce que je veux de mon patrimoine ? Selon la réponse apportée nous nous interrogerons sur les aspects fiscaux de ce choix. Enfin nous proposerons une rédaction de principe.

  1. – Suis-je libre de faire ce que je souhaite de mon patrimoine ?

En ce qui concerne les successions, le code civil français est assurément protecteur de la famille. Contrairement au droit anglo-saxon, les enfants sont des héritiers privilégiés protégés par leur réserve héréditaire (voir les précédentes chroniques). La question posée nous fait penser que cette personne n’a ni enfant ni petit enfant. En conséquence elle est totalement libre de prendre les dispositions qu’elle souhaite !

L’AVIS DU PRATICIEN :

A défaut de testament le patrimoine de cette personne sera réparti entre ses héritiers « du sang » (dits : ab intestat). En l’espèce son patrimoine sera divisé en deux parts égales, une moitié reviendra à ses héritiers les plus proches du côté de sa mère, l’autre moitié du côté du père. A défaut d’héritiers au septième degré c’est l’Etat Français qui reçoit tout le patrimoine. Dans un tel cas la rédaction d’un testament reprenant les désirs personnels du testateur est indispensable !

  • – Les aspects fiscaux

Il est assez simple de rédiger un testament olographe (voir les précédentes chroniques), mais il est plus complexe d’en analyser les conséquences fiscales. Pour simplifier nous examinerons le cas de tante Marie qui souhaite léguer ses biens à ses deux neveux Pierre et Jean tout en privilégiant sa fondation préférée, l’OCH !

            2-1 Solution simple…mais couteuse !

Tante Marie prend une feuille de papier et institue pour légataires universels ses deux neveux ! Trois lignes manuscrites et l’affaire est réglée… Malheureusement avec une telle rédaction le trésor public sera le premier héritier de notre gentille tante. En effet les droits de succession entre tante et neveux s’élèvent au taux de 55%. Ainsi, si tante Marie laisse un patrimoine de 100, le trésor reçoit 55 et chacun des neveux 22,5 ! Peut-on faire mieux ?

            2-2 Solution moins onéreuse…mais un peu plus complexe !

Tante Marie peut instituer LEGATAIRE UNIVERSEL la Fondation OCH à charge pour la fondation (qui ne paye pas de droit de succession en sa qualité de fondation reconnue d’utilité publique) de délivrer à Pierre et Jean chacun un legs de 22,5 nets de frais et droits.

Comment s’analysent de telles dispositions ?

Au décès de tante Marie, la Fondation OCH reçoit le patrimoine de la défunte, soit 100, avec l’obligation (et le notaire en charge de la succession en assurera la parfaite exécution) de verser aux deux neveux chacun 22,5 et de régler les droits au trésor public soit (22,5x2x55%) 24,75. Sachant que l’OCH est légataire universel, elle conserve le solde de la succession soit (100 –22,5 – 22,5 – 24,75) 30,25.

L’AVIS DU PRATICIEN :

Cette rédaction simplifie le travail des neveux au décès de leur tante. En effet la Fondation OCH légataire universel sera chargée, avec l’aide du notaire, de liquider la succession de Marie. Il remettra à Pierre et à Jean, chacun, la somme de 22,5, sans que ces derniers n’aient de décisions à prendre ni de démarches à réaliser.

L’AVIS DU PRATICIEN :

Cette proposition contraint notre testatrice à léguer des quotes part (et non pas des biens en particuliers). Toutefois une analyse fine du patrimoine de Marie pourrait permettre de léguer à Pierre ou Jean un bien spécifique, mais attention aux modifications de valeurs dans le temps ! Le conseil d’un professionnel est à notre avis requis !

            2-3 Comparaison…n’est pas raison.

SOLUTION 1                                 SOLUTION 2

Pierre reçoit 22,5                         Pierre reçoit 22,5

Jacques reçoit 22,5                     Jacques reçoit 22,5

                                                           L’OCH reçoit 30,25

L’état reçoit 55                             L’état reçoit 24,75

  • La rédaction du testament :

Voilà une proposition de rédaction 

« Ceci est mon testament révoquant toutes dispositions antérieures.
Je soussignée Madame Marie +++, née à +++, le +++ , demeurant à +++, institue pour légataire universel la Fondation O.C.H ayant son siège 90 avenue de Suffren 75015 PARIS, à charge pour mon légataire de délivrer les legs suivants, nets de frais et droits :

  • 22,5% à mon neveux Monsieur Pierre +++ né à +++ le +++ et demeurant à +++, présent ou représenté,
  • 22,5% à mon neveux Monsieur Jean +++ né à +++ le +++ et demeurant à +++, présent ou représenté.

Fait à +++ , le +++

Signature. »

L’AVIS DU PRATICIEN :

La mention « présent ou représenté » répond à l’éventualité du décès accidentel de Pierre ou de Jean avant leur tante. Cette mention permet de remettre la part du neveu prédécédé à ses propres descendants. Si l’un d’eux décède avant sa tante sans postérité, la rédaction du testament fera que sa part reviendra à la fondation. Si la testatrice souhaite que dans un tel cas la part du neveu prédécédé revienne à l’autre légataire elle devra ajouter la mention suivante à la fin de son testament : « en cas de prédécès d’un de mes neveux sans postérité, sa part reviendra à mon autre neveu »

Cet article est rédigé par M. Philippe Bourdel, qui apporte son expertise à la Fondation OCH, en tant que notaire retraité et co-fondateur de Fragilis, GIE dédié au droit des personnes en situation de handicap.

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