Sur les lèvres

Le fantasme du chef parfait

une femme en fauteuil roulant en réunion d'entrepreise
© Istock.

Si l’on attend d’avoir une santé parfaite pour devenir chef, on ne le deviendra jamais. En effet, selon la définition de l’OMS, la santé « est un état de complet bien-être physique, mental et social ». Or nous sommes tous malades ou handicapés si l’on prend cette définition au pied de la lettre. Qui peut se vanter d’être dans un complet état de bien-être ? J’ai un doute : ceux qui lèveront la main seront-ils parfaitement sincères ?

Ceci est une bonne nouvelle pour les personnes en situation de handicap : la santé parfaite est une parfaite illusion. Donc nous, les personnes en situation de handicap, sommes tout à fait légitimes pour prendre des responsabilités. Les barrières sociétales empêchant les personnes en fauteuil roulant, aveugles, sourdes, diabétiques, psychiquement fragiles, diminuées par des séquelles liées au Covid, de prendre des responsabilités n’ont finalement que peu de raison d’être. N’avons-nous pas tendance à souvent nous autocensurer, nous interdisant de prendre la vie et nos responsabilités à bras-le-corps ? Même si les bras sont fragiles et le corps abîmé, osons être premiers de cordée en ayant conscience que les soi-disant personnes en bonne santé cachent souvent de lourds handicaps invisibles.

Ne sommes-nous pas les mieux placés pour faire vivre enfin la fameuse notion de subsidiarité souvent évoquée mais si rarement mise en œuvre ? En effet, un chef qui connaît ses limites et ses fragilités sera mieux à même de guider ses équipes. Comme le fut Jean-Christophe Parisot de Bayard, premier préfet handicapé de France, qui nous a ouvert la voie de façon magistrale. Ou l’est aujourd’hui Damien Abad, homme politique. Mettons-nous donc à leur école avec confiance et espérance.

Aliénor Vinçotte, ombresetlumiere.fr – 6 avril 2021

Portrait d'Alienor Vinçotte

Sourde de naissance, Aliénor Vinçotte est diplômée de Sciences Po et journaliste.

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