OUI DE MARIE

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Bruno : Florence, dimanche dernier, l’Eglise nous a invité à la joie ; comment peut-on vivre la joie quand on est confronté au handicap ou à la maladie ? 

 C’est vrai Bruno qu’au premier degré, joie et handicap sont antinomiques. Pour nous éclairer, j’aime m’appuyer sur cette explication qu’écrivait Jean-Paul II pour le temps de l’Avent : « Savoir que Dieu est proche, attentif et plein de compassion … qu’il est un Père miséricordieux qui s’intéresse à nous … est motif d’une joie profonde ».

Qui que nous soyons, quelle que soit notre épreuve, Dieu se fait proche et tendre : voilà la bonne nouvelle ! Mais nous ne le vivons pas dans l’immédiateté, nous sommes en chemin, comme Marie. Quand l’ange Gabriel lui présente le plan de Dieu qui en un sens bouscule totalement le sien, son oui est ferme mais Marie n’exultera de joie qu’au moment de la Visitation. La joie de Marie ne vient donc pas à l’instant où elle dit oui.

Cela me parle, me rassure car il y a de la place pour un chemin et me fait penser à toutes les personnes à qui un jour on annonce un diagnostic de handicap ou de maladie qui va changer leur vie. Leur long chemin, rarement linéaire, est celui d’accueillir la nouvelle, puis d’y consentir, dire oui à l’inévitable, à l’irréversible. La joie n’est pas immédiate. C’est un chemin, parfois même un combat.

Bruno : A quelles situations pensez-vous ?

De nombreux visages me viennent tout de suite en tête, Bruno. Par exemple, Olivier, papa d’une jeune polyhandicapée témoigne dans la revue de la Fondation, Ombres & Lumière : « La naissance de notre fille a été une grande joie mais très vite nous avons eu des inquiétudes face à son développement et ma joie a été altérée. Quand le diagnostic a été posé, la joie a pu revenir car je savais ce que j’avais à faire ».

Croyons qu’un chemin est toujours possible quand bien même nous nous sentons dépassés, dévastés, car Dieu se fait proche et tendre.

Florence Gros

Dans son livre Tango 2, Agathe de Miniac écrit : « Cette joie indescriptible, seuls les parents d’enfants handicapés la ressentent. C’est le cadeau après la peur, la crainte, les larmes et la honte ».

Des amis handicapés me confient souvent que si la joie est possible, elle est à demander sans cesse. Alexandre Jollien, philosophe et infirme moteur cérébral, rappelle dans son livre audio, la philosophie de la joie, que s’il n’a pas choisi le handicap, il peut choisir de le vivre pleinement et dans la joie même si ce n’est pas facile tous les jours.

En ce sens, la joie n’est pas une émotion fugitive, elle devient une manière de vivre. Avec Marie, pour revenir à elle, on découvre que la joie est don de Dieu et chemin de vie.

Bruno : La joie, chemin de vie, dites-vous ? Mais encore …

Lorsque l’ange Gabriel fait irruption dans sa vie, Marie est troublée, craintive, voire bouleversée, elle pose une question qui montre la confiance qu’elle a en Dieu et aussitôt rassurée par l’ange, elle dit oui. Son consentement est alors entier. Elle affrontera difficultés et épreuves jusqu’à la Croix en redisant ce oui, jour après jour. Demandons la grâce de pouvoir redire notre oui chaque jour sans le remettre en question. Par ailleurs, Marie est traversée par l’étonnement, l’incompréhension, la stupeur. La confiance et l’acquiescement viennent après. Et la joie encore plus tard.

Croyons qu’un chemin est toujours possible quand bien même nous nous sentons dépassés, dévastés, car Dieu se fait proche et tendre. J’ai été témoin de vies coupées dans leur élan. J’ai aussi été témoin de consentement, de lâcher- prises, de plongeons dans la confiance, qui ont donné place à la joie. Souvenons-nous de tous ces oui posés, de tous ces chemins pour nourrir la joie.

Florence Gros sur RCF – 13 décembre 2022

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