Handicaps invisibles au travail, le révéler ou pas ?

Femme qui passe un entretien d'embauche.
@ Adobe Stock

Clara : Dimanche, c’était le 1er mai, la fête du Travail. C’est l’occasion de parler de travailleurs qui ne sont malheureusement pas toujours à la fête, ceux dont le handicap est invisible, qui sont très nombreux !

« Mon interlocutrice s’est mise à écrire nerveusement, sans plus pouvoir lever le nez de sa feuille… Un grand malaise planait » C’est Sophie qui se souvient ainsi dans la revue Ombres et Lumière d’un entretien d’embauche qui n’a débouché sur rien. Elle venait de révéler qu’elle souffrait d’épilepsie, d’où, pense-t-elle, la réponse négative quelques jours plus tard. Du coup, elle a décidé de ne plus en parler en entretien, sans être tout à fait sure qu’elle avait raison. A un moment où à un autre, en cas d’embauche, une crise surviendrait qui l’obligerait à dire la vérité.

La situation de Sophie résume bien la problématique qui se pose aux personnes souffrant de handicaps invisibles – quatre-vingts pour cent des handicaps le sont – : faut-il en parler à l’employeur et aux collègues ? ou faut-il garder le secret ? Le dilemme est cruel.

Ce qu’on sait, c’est qu’une politique positive de l’entreprise en la matière est une chance pour tous.

Clara : Et le plus généralement quel choix font ces personnes ?

Le Monde nous apprend que le problème s’est renforcé avec l’apparition du Covid dit long : « fatigue écrasante, brouillard mental, maux de tête, essoufflement… explique le docteur Laurent Uzan, coauteur d’un livre sur le sujet- « il touche des personnes en activité qui culpabilisent de ne pas remonter la pente assez vite ». C’est le cas de Matthieu, chercheur « J’ai l’impression de penser au ralenti, j’ai du mal à faire face, je me suis mis en difficulté sur un projet ».

Le journal Le Monde révèle qu’ils sont des millions à préférer le cacher : « je vis avec la maladie de Crohn depuis trente ans, et je l’ai toujours cachée à mes employeurs » reconnait Hélène. Pas facile quand les crises de douleurs sont aigues : « t’as vraiment l’air shootée » lui lâche un jour un collègue. Sans parler de l’épuisement à tenir coûte que coûte : « nier le problème expose à la rupture physique, psychique, ou relationnelle » explique un médecin spécialiste de la douleur. Pour certains, le handicap, invisible à l’embauche, peut se révéler rapidement. C’est le cas de Louise, dyslexique, qui s’est vue reprocher ses fautes d’orthographe innombrables à chaque remise de rapports; il lui a bien fallu reconnaitre.

Clara : Alors, finalement, en parler ou ne pas en parler ?

Au final, on le devine à travers tous ces témoignages, Clara, mieux vaut la vérité, en cherchant le meilleur moment pour le faire, sans pour autant chercher à informer toute l’entreprise, mais en discernant ce qui est juste pour soi-même et pour l’équipe.

Ce qu’on sait, c’est qu’une politique positive de l’entreprise en la matière est une chance pour tous : les postes plus ergonomiques, les rythmes individualisés, le télétravail ajusté, l’accessibilité des locaux, profitent à tous les collègues. Sans parler de l’attention à l’autre qui génère un climat de confiance et d’entraide qui rend l’équipe plus performante. C’est alors l’entreprise qui s’en porte mieux !

Philippe de Lachapelle sur Radio Notre-Dame – 3 mai 2022

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