Demeurer à côté de celui qui souffre

Fille au côté de sa mère.
@Istock

VD : La maladie fait partie de la vie, hélas. La crise sanitaire nous l’a rappelé douloureusement. Peut-il sortir quelque chose de bon de cette expérience ?

« La douleur isole d’une manière absolue, et c’est de cet isolement absolu que naît l’appel à l’autre ». Ces mots sont du philosophe Emmanuel Levinas, dans « une éthique de la souffrance » chez « Autrement ». Et c’est le Pape François qui le cite dans son message pour la trentième journée des malades ce 11 février. Et François de commenter : « Quand une personne fait l’expérience de la fragilité et de la souffrance, son cœur devient lourd, la demande de sens pour tout ce qui arrive devient plus urgente ». Il ajoute encore : « d’où l’importance d’avoir auprès de soi des témoins de la charité de Dieu qui, à l’exemple de Jésus, versent sur les plaies du malade l’huile de la consolation et le vin de l’Espérance ». Ces quelques phrases résument tout le message du Pape pour cette journée mondiale des malades.

VD : On devine du coup qu’il nous appelle à être ces témoins ?

Oui Valentin, il nous invite avec insistance à nous faire proches de ceux qui sont atteints par la maladie : « Visiter les malades est une invitation que le Christ adresse à tous ses disciples – dit-il- le ministère de la consolation est un devoir de tout baptisé ». Cette invitation à visiter celui qui est isolé par la maladie me rappelle un texte du Talmud, qui date de seize siècles, et qui dit : « Celui qui vient en visite chez un malade doit se couvrir entièrement et s’assoir devant lui, car l’Eternel est au-dessus de la tête du malade ; l’Eternel au-dessus de son lit de douleur le soutient ».

Lorsque nous visitons une personne malade, nous sommes toujours trois : le malade, celui, celle qui visite, et Dieu, qui nous précède auprès du souffrant.

VD : Visiter un malade devient presque une liturgie !

D’une certaine manière, oui, Valentin. Lorsque nous visitons une personne malade, nous sommes toujours trois : le malade, celui, celle qui visite, et Dieu, qui nous précède auprès du souffrant. Il nous est ainsi donné de contempler l’Eternel au-dessus de lui.  Cette rencontre devient un mystère dans lequel on ne peut entrer qu’avec un profond respect qui révèle à la personne son infinie dignité:  « Le malade est toujours plus important que sa maladie » nous dit François qui appelle à une profonde écoute du patient dans sa singularité.

Il nous invite à une conversion du regard sur la personne malade. Entendre son cri : « Combien de malades et de personnes âgées vivent chez eux et attendent une visite ! » dit-il ; et sous le masque parfois déformant de la souffrance, découvrir la beauté de la créature de Dieu. Découvrir cet homme à l’image de Dieu, tout comme Jésus, présenté par Pilate à la foule dans sa nudité d’homme souffrant, était présence de Dieu : « Ecce homo – voici l’homme ».

Une alliance nait, qui nous invite à demeurer avec celui que l’on visite, en qui Dieu lui-même se fait présent. Le Pape François nous le rappelle en citant Jésus en l’Evangile de Mathieu: « J’étais malade et vous m’avez visité ».

Philippe de Lachapelle sur Radio Notre-Dame – 8 février 2022

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