Bioéthique, il est encore temps d’agir
« En 2078, à 75 ans, si j’ai des enfants, peut-être qu’ils me demanderont pourquoi vous n’avez rien fait ». C’est Greta Thunberg, qui tenait ces propos devant les chefs d’état de la COP 24. Cette jeune femme, autiste asperger, lance un cri d’alarme vibrant pour la planète, sacrifiée selon elle, pour que des riches puissent vivre dans le luxe, au prix de la souffrance des plus fragiles. Gréta s’est adressée ainsi avec la même force aux parlementaires français en juillet dernier : « Cela ne fait que commencer et cela va empirer » leur a-t-elle lancé en dénonçant leur refus d’agir.
Pure coïncidence, c’est au même moment que le gouvernement présentait son projet de loi bioéthique que ces mêmes députés s’apprêtent à voter. Et là aussi, on a envie de dire : « Cela ne fait que commencer et cela va empirer ». Car sans surprise, dans tous les domaines, les lignes infranchissables d’hier deviennent les bonnes mesures d’aujourd’hui, bien encadrées bien sûr, pour éviter toute dérive… Sauf que chacun sait que le cadre dérive déjà vers les nouvelles lignes infranchissables qui tomberont la prochaine fois. « La GPA, jamais ! » entend-on, sauf qu’elle emboite déjà le pas à la PMA.
Hélas, en matière bioéthique, comme en matière climatique, nous allons là où nous ne voulons pas aller, et là aussi, nos enfants nous demanderont pourquoi nous n’avons rien fait. Dans les deux cas, il est question de fragilité, celle de la planète d’un côté, celle de l’homme de l’autre. Le refus de la fragilité de la personne humaine traverse presque tous les aspects du projet de loi bioéthique : diagnostics prénatal et préimplantatoire de plus en plus poussés, sélection génétique embryonnaire, embryons transgéniques, tout cela pour un bébé conforme à nos attentes. Une pression que la PMA renforce, la science devant « livrer » un enfant sans défaut. « On sort de la perspective de l’homme soigné pour entrer dans la logique transhumaniste de l’homme dépassé » déclare le Professeur Emmanuel Sapin, chirurgien et néonatologue, dans le Figaro.
Oui, ce projet de loi bioéthique ouvre encore plus les portes à des mutations que nous n’avons pas choisies. Et comme pour le climat, elles sont portées par les besoins individualistes des plus riches dans un marché mondialisé et dominé par la science. Là aussi, les plus fragiles seront au mieux les oubliés, au pire les victimes ! A moins d’agir tant qu’il est encore temps ! Et il est encore temps.
Philippe de Lachapelle sur Radio Notre Dame