Le handicap en entreprise, question de sens

« J’en ai marre de la charité, ce que je veux, c’est qu’on me donne les moyens de me battre à armes égales ». ces mots de colère ont été criés par une jeune femme en fauteuil roulant dans un colloque sur l’emploi des personnes handicapées. Et de dire avec force son souhait d’être recrutée pour ses compétences, et de réclamer les accessibilités, les adaptations, pour qu’elle puisse exercer son métier à égalité de chances.
Cette revendication de pouvoir se battre à armes égales m’a interrogé. Elle est à l’image de ce que trop souvent nous percevons du monde du travail : un lieu de combat, où nous luttons les uns contre les autres. Un monde dur, qui réussit aux plus forts, et dont les plus fragiles sont écartés. Un monde angoissant, car si aujourd’hui je m’en sors, qu’en sera-t-il quand je traverserai moi-même un épisode de fragilité ? Maladie, dépression, accident, chômage…
Développer l’emploi des personnes handicapées est un devoir de justice – Le taux de chômage des personnes handicapées est deux fois supérieur à la moyenne nationale- Mais il est aussi une chance pour l’entreprise. Une chance pour découvrir que vulnérabilité et performance économique font bon ménage. Trop souvent le monde du travail est conçu comme la seule juxtaposition d’individus compétents et performants – fragilité interdite !
Sauf que la fragilité, ça existe ! Inclure une personne handicapée, c’est inclure sa compétence certes, mais c’est aussi inclure ses besoins spécifiques ; c’est permettre que se développe dans le service un esprit d’entraide, avec l’inventivité que cela génère pour le bien de tous ! « Très souvent, –témoigne ce chef d’entreprise en pointe en matière d’inclusion – ce qui pèche, c’est la capacité d’exprimer à ses collaborateurs le besoin que l’on a d’eux pour progresser soi—même ». et de constater : « Quand il y a des personnes handicapées dans l’équipe, avec cette attention aux autres, la question du sens ne se pose plus »
Alors, entraide, ou combat ? Nous sommes dans la semaine de l’emploi des personnes handicapées. Une bonne occasion de prendre la mesure que ce qui est en jeu, c’est la question du sens même du travail. «Et quand vous avez résolu la question du sens dans une entreprise –conclut ce même chef d’entreprise- vous avez résolu 80% des questions ». C’est gagnant/gagnant !
Philippe de Lachapelle sur Radio Notre Dame