Trop d’enfants handicapés placés à tort

« 30% des gamins de l’aide sociale à l’enfance sont porteurs d’un handicap ». C’est Adrien Taquet, secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’enfance, qui s’exprimait ainsi sur la chaine « Public Sénat » le 13 février dernier. Or, l’ASE, aide sociale à l’enfance, ne devrait pas concerner le handicap. Elle concerne des familles qui ont des difficultés qui risquent de compromettre gravement l’équilibre de leurs enfants. On peut donc s’étonner que tant d’enfants handicapés, -un tiers, c’est énorme !- soient ainsi pris en charge par l’ASE, et non par les dispositifs médico-sociaux ajustés à leur handicap.
Les raisons sont multiples selon le secrétaire d’état : la survenue du handicap est plus fréquente dans les milieux défavorisés ; le manque de place en établissements spécialisés conduit parfois à des situations de détresse; et pire, certains parents sont suspectés à tort de ne pas s’occuper correctement de leur enfant handicapé. Ils font alors l’objet d’une information préoccupante, qui déclenche les mesures de protection par l’ASE.
Ca avait été le cas de Rachel, dont la situation avait défrayé les médias et mobilisé deux ministres en sa faveur entre 2015 et 2019. Cette maman de trois enfants avait fait l’objet de trois décisions de justice successives, avec à chaque fois des mesures de placement de ses enfants – on la pensait incapable, et même qu’elle était la cause des difficultés de ses enfants, jusqu’à ce que qu’ils soient finalement reconnus autistes… Rachel, avec ses pauvres moyens, mais de toutes ses forces, se battait pour qu’ils soient bien diagnostiqués et correctement accompagnés. Mais ce n’était hélas pas la compétence de la protection de l’enfance à qui étaient confiés ces enfants, ça aurait été celle des Maison Départementales des personnes handicapées.
« Ces enfants doublement vulnérables devraient bénéficier d’une double attention et d’une double protection » avait noté la défenseure des enfants, dans un rapport en 2015. Et c’est l’inverse qui se produit. « Quand vous êtes au croisement de deux politiques publics – explique Adrien Taquet – vous tombez dans le trou entre les deux » Et notre ministre de lancer un plan d’action pour que ce trou soit enfin comblé, dans l’intérêt de ces enfants – ils sont quand même plus de 70 000 en France ! – et de leurs parents, qui parfois, comme Rachel, resteront marqués à vie par l’épreuve de cette maltraitance institutionnelle.
Philippe de Lachapelle sur Radio Notre Dame